Ficelle
27 septembre 2017
Photos: Benoit Guenot
Text: Palmyre d'Anthenaïse
Sur la route. Toujours sur la route. Ne pas se retourner. Choisir ses étapes. Et ne jamais venir les mains vides.
Retour de primeur 2016 à Bordeaux, au château La Dominique, rooftop party avec Lignac, Gagnaire et les clefs du châteaux. Saint Emilion mon amour.
Petit détour par Nantes, boire quelques vins natures, what’else?! Et coup de téléphone aux copains:
« Alors t’es où ? » Toujours cette putain de question..
« À Nantes avec Brice Poil, on sur la fin d’une cuvée de Michel Isally, je vais dormir là je pense et vous rejoindre demain ma… »
« Allez débarques ! On est à la maison, Fléchettes et Brel à fond ! »
« J’arrive ! »
Vroum. Ligne Blanche. Lumière rouge. La croix en Touraine. Triple quatorze. Walou. Black-out.
Debout avant les premiers rayons du soleil, deux brocantes sur le chemin, on ne sait jamais, il y aura peut être un petit Clos Rougeard ou un grand Chenin.
Début d’après midi la cour se réunit, on accueille la cuisse royale et on prépare la corde pour là pendre en place public. Gigot ficelle copain ! Plat signature de la maison. Combien de fois l’énorme cheminée a fait rougir de plaisir cette merveilleuse gambette ?
Round 1: La cuisson. La quoi ?!
Et là c’est le pugilat. Un vrai démocratie: Cause toujours.
« 6 heure comme la dernière fois ! »
« 7h, mais a tout les coups on mangera a 1h du matin, bien déchiré ! »
« 8 »
Bon on le lance en début d’après midi, vu le mode de cuisson ça risque pas d’être trop cuit. Ça se fera à la couleur, à l’odeur, nos sens primaires seront les juges.
Round 2: Fini de rigoler, direction le coffre de la voiture, entre la pelle, le seau et les restes d’un Mcdo, j’extirpe une caisse en bois contenant un mix du tonnerre de dieu ! Un truc pour convertir toutes les chapelles: Tu supportes plus le conventionnel ? Comment résister à un Musigny 1989 de chez Comte de Voguë? Tu ne comprends pas le vin nature ? Comment ne pas devenir dingue sur une cuvée Cosmic Débris de La Petite Commanderie ?
La table est posée, les bouteilles ouvertes, le diner se fera sous le cerisier en fleur. Des tartes sont en préparations: tatin de tomates et beternut/sauge. Mamamia ! Le tableau est beau, tout y est, enrobé de l’odeur délicieuse qui s’échappe de la cuisine.
De nouvelles voitures arrivent, les copains sont tous là, les enfants se toisent, timides, se sourient et filent a travers champs. Les verres se remplissent et le soleil nous quitte doucement.
Fuck that’s delicious ! Comme dirait l’autre. La cuvée BB du domaine Partida Creus, véritable délire espagnol, entre Tarragone et Barcelone, a ce pouvoir de provoquer un panel infini de réactions: ça va de l’incompréhension au coup de foudre.
Certains vont se rassurer dans les bras d’un échezeaux de Renée Engel de 1991, classic shit !
Les magnums s’enchaînent: Nuit d’Ivresse 14, Les Bournais de Chidaine, Autrement et encore du domaine Les terres Promises, rouge sur blanc tout fout le camp, organique sur chimique c’est polémique.
La nuit tombe et très vite le froid à raison de la tablée. On se rapatrie près de la cheminée. La grande pièce est investi et la table est à nouveau dressée. La cuisse est toujours là, au bout du file, peignée régulièrement d’huile, d’herbes et surtout de baisers.
Un combo magique se met alors en place, rond croix triangle: Nina Hagen 99 luftballons X Mephisto du domaine de l’Ecu. C’est le choc! Partez tous et laissez moi avec ces deux là, ici et maintenant. l’Allemande et le cabernet franc, bim bam boom, feu d’artifice, profondeur des abysses, charme insolent, folie douce!
Peut-être que c’est là, ici, à ce moment précis, que l’on vit les moments rares et précieux. Quand une odeur, une saveur, un accord, relie l’essentiel.
Le gigot à fini par être prêt, vers minuit, parfait comme toujours, régulier, tendre, charmeur.
Prendre la route, s’enivrer, s’aimer, se trahir, se haïr et finalement se retrouver.